Les OGM tolérants aux herbicides sont déjà obsolètes

Article « Les OGM tolérants aux herbicides sont déjà obsolètes »
paru sur le site www.novethic.fr  le 19 01 2012 par Magali Reinert

La multiplication ces dernières années aux États-Unis de mauvaises herbes résistantes au Roundup discrédite les cultures génétiquement modifiées. En effet, les trois quarts des OGM cultivées dans le monde en 2010 sont des plantes tolérantes à cet herbicide.

Près de 80 % des OGM cultivés dans le monde sont des cultures résistantes à l’herbicide Roundup. Développées par Monsanto, ces semences génétiquement modifiées doivent permettre de faciliter le désherbage en supportant des pulvérisations de l’herbicide également produit par la firme. Mais une étude de l’Inra et du CNRS publiée en décembre 2011 montre que ce modèle biotech a atteint sa limite, à cause du développement dans les champs de mauvaises herbes également résistantes au Roundup.
Aux États-Unis, l’apparition de « supers adventices » oblige ainsi les agriculteurs à multiplier les pulvérisations de Roundup, ainsi que d’autres herbicides complémentaires. Les données recensées par l’Inra affiche une augmentation de la consommation d’herbicides depuis l’introduction des OGM. Des témoignages rapportés par Inf’OGM en 2011 montrent des agriculteurs américains dans des situations dramatiques. Le vice-président de l’Association nationale des cultivateurs de maïs, Tony Roushest, explique comment l’apparition en 2005 d’herbes résistantes au glyphosate l’a amené à augmenter ses doses de Roundup sur les conseils de Monsanto, puis à utiliser de plus en plus d’herbicides différents, sans toutefois régler le problème. Selon cet agriculteur de l’Indiana, le retour au labourage des terres et l’utilisation d’herbicides toujours plus puissants sont aujourd’hui nécessaires pour se débarrasser des mauvaises herbes.

Des OGM développés par les firmes productrices d’insecticides

L’argument commercial des OGM résistants au Roundup, dit Roundup Ready, RR®, était de simplifier le travail et d’économiser des produits chimiques. En effet, deux pulvérisations de Roundup après la levée des cultures devaient suffire à régler le problème du désherbage. Cet avantage devait justifier de payer ces semences jusqu’à 50% plus cher que les semences conventionnelles. Pour parer à l’inefficacité de ses OGM, Monsanto propose aujourd’hui aux agriculteurs des promotions pour l’achat de cocktails d’herbicides. Cette stratégie prolonge la finalité des semences tolérantes aux herbicides (TH), qui est de mieux vendre les herbicides en question. L’étude de l’Inra rappelle en effet que les variétés TH sont développées par des firmes produisant des insecticides, Monsanto bien sûr, mais aussi BASF, Bayer, DuPont. Avec la tombée dans le domaine public du Roundup en 2000, Monsanto a favorisé la vente couplée d’herbicides et de semences RR® pour garder la main sur le Roundup. La firme ajoute aujourd’hui des adjuvants spécifiques à son Roundup et garantit une meilleure tolérance de ses semences à son produit qu’aux autres Roundup arrivés sur le marché. Une stratégie payante, puisque la vente des intrants chimiques de la firme a augmenté de 10 % en 2011, année où Monsanto a enregistré un bénéfice net de 1 milliard de dollars pour un chiffre d’affaires de 4,13 milliards de dollars. Les ventes de semences de maïs GM représentent à elles seules la moitié des revenus de la multinationale (source Monsanto).

Les cultures tolérantes aux herbicides accélèrent l’apparition de résistances

Si le développement de mauvaises herbes résistantes fait partie de l’histoire des herbicides, « l’utilisation de variétés transgéniques TH a considérablement accéléré l’apparition de résistance », explique le document de l’Inra. Lors de la pollinisation, les cultures OGM disséminent en effet directement dans l’environnement leurs gènes modifiés et peuvent transmettre à certaines espèces sauvages le caractère de résistance au glyphosate. Par ailleurs, le phénomène de mutants spontanés, qui ont acquis une résistance sous la pression sélective d’un herbicide, est accentué dans des systèmes de monoculture, avec l’utilisation massive d’un seul produit phytosanitaire. En ce sens, les semences RR® sont victimes de leur succès. Depuis leur introduction en 1996, elles ont en effet connu une évolution fulgurante aux États-Unis. Plus de 90% du soja et du coton et 63 % du maïs américains sont Roundup Ready. Introduite sur le marché depuis 2007, la betterave RR® représente aujourd’hui 95% des cultures de betterave des États-Unis.

BASF renonce à vendre ses OGM en Europe

La multinationale allemande, dont la pomme de terre génétiquement modifiée « Amflora » avait été autorisée par la Commission européenne en 2010, a annoncé dans un communiqué qu’il renonçait au développement et à la commercialisation de nouveaux OGM en Europe. Motif : ces technologies « ne sont pas suffisamment acceptées dans de nombreuses régions en Europe par la majorité des consommateurs, des agriculteurs et des responsables politiques« , indique le groupe. Il renonce également à la culture de l’Amflora mais n’abandonne pas ses demandes d’autorisation en cours pour 3 autres variétés de pomme de terre transgéniques déjà développées.
Selon Robert Bellé, professeur à l’Université Pierre et Marie Curie, un autre mécanisme peut également enter en jeu : « Les effets « génotoxiques » que nous avons montrés pour le Roundup peuvent favoriser des mutations qui permettent l’apparition de la résistance au glyphosate ».

Le Roundup agit sur les mécanismes de développement cellulaire

Tout aussi grave, « les OGM Roundup Ready ont permis au Roundup de rentrer dans la chaîne alimentaire puisque les cultures traitées sont ensuite consommées », s’inquiète le biologiste. Et pour cause : avec son équipe, Robert Bellé est le premier à avoir montré en 2001 que le Roundup a un effet toxique sur les cellules. « Le Roundup intervient entre autres dans la division cellulaire, avec les mêmes symptômes que des agents cancérigènes », explique le chercheur, qui précise qu’il sera très prudent dans ses commentaires : « le Roundup est donc potentiellement cancérigène ». « Potentiellement », car des conclusions tranchées se marient mal avec l’étude de phénomènes aussi complexes que le développement de cancers liés à des facteurs environnementaux. Et si Monsanto n’a jamais contesté la validité des travaux de l’équipe de Robert Bellé, elle en conteste l’interprétation sur les effets sur la santé humaine. « C’est comme pour le tabac, chaque fumeur ne contractera pas nécessairement un cancer. Ces incertitudes bénéficient aux fabricants dans la législation actuelle », poursuit le chercheur.

La toxicité du Roundup et de son principe actif, le glyphosate, nourrit ainsi une importante littérature scientifique. La dernière analyse publiée en janvier 2012 dans Journal of Toxicology and Environmental Health commandée par Monsanto conclue à l’innocuité du glyphosate sur le développement cellulaire. Robert Bellé conteste cette analyse et explique ces différences de conclusions scientifiques : « Le glyphosate seul ne rentre pas dans les cellules. Pris isolément, il n’a donc peu ou pas d’effets toxiques. Mais, pour être actif, il est mélangé avec d’autres produits qui lui permettent de rentrer dans les cellules de la plante et d’agir comme herbicide ». Cette caractéristique a permis d’homologuer le glyphosate et d’autoriser la commercialisation du Roundup.

Magali Reinert
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de Greenpeace
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