France terre d’asile ?

Photo livre Editions Bayard – L’Afrique est un continent qui est en train de vivre une véritable explosion démographique. Mais c’est justement là que les désordres climatiques sont les plus visibles actuellement ! Chassés par des conditions de vie inhumaines à cause de conflits divers, des hommes, des enfants arrivent sur notre continent avec une espérance de vie meilleure.

Notre société a-t-elle les ressources pour accueillir des populations qui n’ont plus rien à perdre car déjà elles n’ont plus rien ?

Ce samedi 24 mars dans la librairie Forum de Saint-Etienne, le père Riffard  présentait un livre, le sien qu’il a mis 6 mois à écrire. Cet ouvrage : «  Accueillons-les- Migrants, Demandeurs d’asile, Réfugiés, Mineurs Isolés » aux éditions Bayard.

Dans cet ouvrage paru le 21 mars le père Riffard traduit sa révolte et son amour pour les personnes rejetées. Cet homme de foi a ouvert il y a plus de 15 ans son église située dans un quartier pauvre de Saint-Etienne nommé Montreynaud, à des demandeurs d’asile vivant dans la rue.

Ce prêtre stéphanois s’est vu poursuivi pour avoir hébergé des demandeurs d’asile dans un lieu de culte et cela contre l’avis de la mairie.

Le 11 juin 2014 à l’issue de son audience devant le tribunal de police, le ministère public avait requis une amende de 11950 euros. Ce prêtre avait commis un crime : celui d’assistance à personnes en danger !

A presque 75 ans ce prêtre, ancien curé de Montreynaud, préside Anticyclone, une association qui a pour vocation d’accueillir et d’accompagner les demandeurs d’asile.

Sans le vouloir vraiment, il a fait de l’église Sainte-Claire- située juste en face du bureau de police du quartier- un toit pour ces migrants démunis en attente d’une nouvelle vie.

Cette situation a transformé cet homme de foi en un hors-la-loi.

Car à l’été 2012 suite à une visite de la commission municipale de sécurité, les services de la mairie ont pris un arrêté interdisant toute activité d’hébergement au sein de l’église et ont fini par saisir la justice pour non respect de cet arrêté.

Bien entendu, que les normes de sécurité n’étaient pas des plus bonnes et on peut comprendre cette initiative mais cependant voici ce qu’affirme le père Riffard :

«  Nous ne sommes pas une structure d’hébergement mais un abri le temps qu’on leur trouve un toit. Les centres d’hébergement sont pleins. Ceux qui arrivent sont laissés dehors. »

On soupçonne Gérard Riffard d’organiser des filières pour migrants !!!…!!!

République démocratique du Congo, Angola, Nigéria, Guinée, Cameroun, Côte d’Ivoire… Les origines des demandeurs d’asile sont multiples. Ceux-ci sont généralement envoyés par d’autres associations ou les services sociaux.

« La préfète pense que nous incitons les gens à venir, déplore le prêtre. En septembre dernier, nous avons été convoqués par la police. J’ai été interrogé pendant cinq heures. Ils me soupçonnaient d’organiser des filières. C’est me donner une importance que je n’ai pas. »

Gérard Riffard estime jouer un rôle de suppléant dans un contexte où l’Etat n’est plus en mesure d’accomplir pleinement sa mission.

« Au lieu de nous embêter, il vaudrait mieux que l’on nous aide, clame-t-il. Notre objectif n’était certainement pas de contrevenir à la loi. Mais nous arrivions à une situation dans laquelle le droit venait en contradiction avec quelque chose de beaucoup plus fort qui est le respect de l’être humain. »

Après de longs tracas judiciaires, actuellement les choses stagnent car il y a une sorte de vide juridique.

Alors, quand on parle avec cet homme d’engagement, on s’aperçoit vite que non seulement la situation est loin d’être réglée mais que depuis la fermeture de l’église la nuit, ce sont des personnes fragiles et affaiblies qui passent les nuits dans le froid d’une cité qui ne peut les accueillir !

Le père Riffard de dire tristement «  On dit au migrants de téléphoner au 115 Samu social, on leur réplique que c’est plein… alors ces mêmes migrants, la journée, épuisés par une nuit sans sommeil, dans un froid qu’ils ne connaissaient pas en Afrique, viennent s’effondrer sur un matelas, les tables de fortune qu’on leur met à disposition le jour. »

Actuellement, la souffrance, la vraie, provient de notre indifférence collective.

Les juges et les lois n’ont eu ni la volonté, ni le courage d’aller jusqu’au bout de la plainte…

Cela traduit bien le désarroi d’une société repliée sur elle-même, qui préfère accuser une victime : le père Riffard.

Parce que cet homme frêle, aux allures d’un curé d’Ars décharné n’a pu fermer les yeux sur les plus faibles, les plus fragiles, les plus vulnérables, il est traduit devant la justice car il a commis un délit : celui de réveiller le démon de notre indifférence !

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Quand je me suis trouvé devant cet homme, j’ai senti en mon cœur tout à la fois une sensibilité, une douceur, une candeur, une fragilité  et quand j’ai croisé son regard c’est une flamme de vie, une foi rayonnante, une forte détermination que j’ai trouvé

On peut m’objecter que cela n’est qu’une question de foi. Avec Gérard Riffard, celle-ci se vit dans le quotidien et pas simplement avec un bréviaire à la main. En fait, on a affaire à un curé pas très « catho » mais tellement proche de notre humanité. Il nous interroge au plus profond de nos consciences :

Changements climatiques, flux migratoires… comment pouvons-nous vivre ce défit en toute sérénité ?

Si effectivement nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde, cependant, pouvons-nous fermer les yeux sur celle que nous croisons tous les jours ?

Roland Reymondier
Ecrivain, conseiller en produits de nutrition