L’arquebuse ou aurone

Le nom botanique de l’aurone est : Artemisia abrotanum de la famille des Astéracées

Cette cousine de la grande absinthe (Artemisia absinthium) et de l’armoise commune (Artemisia vulgaris) est une espèce européenne d’origine incertaine (Dalmatie ou Asie Mineure) souvent cultivée en France comme plante ornementale et condimentaire.
Sous arbrisseau très aromatique rappelant à la fois le parfum de l’absinthe et du citron ,l’aurone mâle appelé aussi armoise citronnelle se caractérise par son port dressé et ses feuilles semi-persistantes très divisées en lanières de couleur vert bleuté , velues dessous et glabres sur le dessus. Les fleurs jaunes qui apparaissent en août sont de petits capitules réunis en panicules denses et penchés.
Cette plante est connue depuis l’Antiquité pour son usage condimentaire et médicinal. Les feuilles fraîches au gout citronné servent à aromatiser les salades , le vinaigre, les sauces et à apprêter les viandes rôties et les poissons comme l’anguille ou le mulet. Connue comme vermifuge à l’instar de l’absinthe , on la prenait en infusion pour chasser le ver solitaire. On en faisait également de petits bouquets séchés destinés à repousser les insectes , les pucerons et les mites d’où son surnom de « garde robe ». D’après Pline, une branche d’aurone placée sous l’oreiller avait la propriété de lutter contre les maléfices qui causent l’impuissance…
Au Moyen-âge , l’aurone fait partie de la liste des plantes dont la culture est recommandée par le capitulaire De Villis édité par Charlemagne.

En Dauphiné, cette plante connue sous le nom d’arquebuse bénéficie d’une très bonne réputation. La plupart des Dauphinois l’utilise sous forme d’une liqueur obtenue en faisant macérer les feuilles fraîches dans de la gnole.
Contrairement au genépi ou à la vulnéraire des Chartreux que l’on va cueillir à l’état sauvage , l’arquebuse est une plante des jardins que l’on « se passe » de générations en générations. La coutume voulait d’ailleurs que quand des jeunes mariés s’installaient, la famille leur offrait un pied d’arquebuse à planter au jardin. Cette liqueur est le plus souvent utilisée pour soigner les coups de froid, pour faciliter la digestion    aurone
et pour soulager le « mal de ventre ». Cette dernière indication est à prendre au sens large et désigne les douleurs provoquées par les règles. Tout comme sa cousine, l’armoise commune, l’arquebuse est une plante tonique amère, stomachique et emménagogue

Mais d’où vient le terme d’arquebuse ?  Cette appellation pourrait évoquer la propriété vulnéraire de la plante
utilisée pour soigner les plaies et les brûlures causées par les armes à feu du temps des soldats de Napoléon
qui  tiraient avec des arquebuses.
Il faut noter que la liqueur d’arquebuse ne doit pas être confondue avec l’Arquebuse de l’Hermitage , une liqueur vulnéraire à base de 32 plantes lancée par les frères maristes au XIXème siècle à St Genis Laval, ni avec l’eau d’Arquebusade ou élixir ARSAD fabriqué en Suisse.

Souvent méconnue ou ignorée en thérapeutique, l’aurone mériterait plus d’attention. Des travaux modernes ont confirmé ses propriétés antispasmodiques liées à la présence de flavonols méthoxylés . Sa saveur aromatique légèrement amère ouvre l’appetit et tonifie la digestion.
Comme pour l’absinthe, l’huile essentielle issue de cette plante  a une composition variable selon la provenance : il existe des chémotypes à 1-8 cinéole et à thuyone. Bien que la thuyone soit une cétone neurotoxique, aucun problème de toxicité aigue ou chronique n’a été signalé avec la plante entière car la teneur en thuyone est trop faible aux doses normales d’utilisation . Par prudence, on déconseille cependant son usage chez les femmes enceintes ou allaitantes.

Pour terminer voici une recette de liqueur de montagne que vous pourrez réaliser cet été :
Génépi (Artemisia mutellina) …………………………………15 g
Arquebuse( Artemisia abrotanum)…………………………… 5g
Achillée millefeuille (Achillea millefolium)………………….5g
Tanaisie( Tanacetum vulgare)………………………………….. .5g
Cerfeuil musqué (Myrrhis odorata)…………………………….5g
Faire macérer les plantes dans un litre d’alcool à 90° pendant 15 jours puis filtrer et ajouter 800g de sucre et un litre d’eau . Bien mélanger et mettre en bouteille. Laisser reposer plusieurs mois avant de consommer avec modération.